Le Pourquoi du Comment...

Le vent soufflait soulevant les poussières et les graviers à une telle force que l'impact avec une telle chose aurait fait un trou dans un gilet en kevlar terrien. Pourtant, elle était là...

Comment tout a commencé ? C'était il y a quelques mois déjà. Elle ne savait plus bien... C'est vrai qu'elle avait tenté de tout oublier alors, maintenant, chercher la raison de sa présence... Elle voulait expliquer à Anais pourquoi elle était là mais elle avait peur de sa réaction.

Terre, Europe, Croatie, une plage, dix huit mois avant les évènements présents, le soleil se couchait doucement à l'horizon, son reflet sur les vagues. Elle trouvait toujours cet instant magique en se sachant privilégiée... Elle ne vivait pas dans le luxe mais suffisamment bien pour voyager et quitter les métropoles surpeuplées... C'était le début de l'été. Il n'y avait personne d'autre qu'elle sur la plage. Elle en avait l'habitude, rares étaient les gens à venir ici... Elle s'était éloignée de la civilisation pour se mettre nue. Elle n'aimait pas bronzer et voir les marques sur son corps. Il est vrai qu'à l'heure actuelle, il valait mieux s'exposer un minimum. Elle ne le faisait plus que dix minutes par jour.
Le vent la caressait, allongée sur le ventre, le corps offert à la nature et à cette plage qui l'entourait.

Une ombre passa devant elle. Deux hommes l'observaient à quelques pas... Elle tenta de cacher son corps qu'ils avaient déjà tant admiré...

Elle se réveilla allongée dans un lit. Regardant autour d'elle, elle ne reconnut pas l'endroit. Tout lui faisait penser à un hôpital.
Aalia se leva et ses jambes se dérobèrent. Un des fils qui la reliaient à une machine se détâcha et un son strident se fit entendre. Une infirmière en blouse blanche apparut bientôt. Aalia n'avait pas su se relever seule.
Que fais-je ici ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
Vous êtes ici depuis trois mois... Le docteur viendra vous voir sous peu. Je vais aller le chercher...
Que fais-je ici ? Je me souviens de la plage... Le coucher de soleil et, maintenant...

Un homme d'une quarantaine d'années entra bientôt dans la salle, vêtu d'une blouse blanche et d'un stétoscope.

Ah, Mademoiselle, enfin réveillée ? Cela fait maintenant trois mois que vous êtes ici ?
... Comment cela ?
Vous avez été retrouvée sur une plage, nue... Je ne puis vous en dire plus pour le moment...
Mais, dites-moi ce que j'ai !...
Pour cela, je dois vous faire quelques examens. Puis, la police viendra... Allez, laissez-vous faire...

Intimidée et perdue, elle le trouvait tout de même séduisant, elle qui n'avait pas encore la trentaine.

Quel est votre nom ?
Aalia...
Aalia comment ?
Aalia... Je ... Je ne sais plus...
Ce n'est pas grave. Cela reviendra, c'est sûrement dû à votre comas.

Il l'avait laissée seule. Elle avait regardé la fenêtre une heure durant cherchant ses souvenirs perdus.
Les policiers étaient ensuite passés. Une femme était parmie eux. Elle lui avait expliqué ce que le médecin n'avait voulu faire. Violée et battue à mort, enfin presque puisqu'elle était encore.
Elle n'avait aucun souvenir de cela. Aller sur la plage, oui. Elle en avait l'habitude.

Une semaine plus tard, elle put sortir de l'hôpital. Elle devait être suivie en psychiatrie pour ses souvenirs perdus... Elle désirait savoir ardemment ce qui s'était passé. Elle voulait surtout voir celui qui lui avait fait perdre une partie de sa vie payer pour ce qu'il lui avait fait.
Aalia fila vers cette plage où sa vie avait changé. Elle l'avait entourée sur un plan qu'elle avait obtenu à l'hôpital et mémorisé l'itinéraire pour s'y rendre. C'était une chose dont elle ne se souvenait pas.

Les vagues roulaient sur ses pieds. Elle était mouillée jusqu'à mi-mollets. cela faisait une heure qu'elle était là, sans avoir bougé.
La mémoire de cette journée lui était revenue. Elle avait décidé de prendre un bain de soleil sur cette plage isolée. L'endroit était si loin de tout qu'elle avait pensé profiter de l'occasion pour ne pas avoir de marques dues à son maillot... La suite ? Les deux hommes... Oh oui ! Maintenant, elle se souvenait d'eux. Des coups ! Des abominations qu'ils lui avait faites ! Tout ! Elle se souvenait de tout ce qui s'était passé jusqu'à ce qu'elle perde connaissance à l'article de la mort...
Elle hurlait à la mort intérieurement tandis que seules les larmes qui coulaient sur ses joues montraient son désarroi et son désespoir. Ils avaient abusés, l'avaient battu et l'avaient laissé pour morte. Ils avaient voulu la tuer, c'est tout ce qu'elle retenait de ces hommes !

Rentrée chez elle, la nuit était tombée, elle pleura sous la douche... En position foetale, elle réfléchit à son avenir.

Le lendemain, elle entra dans une armurerie. Un petit paquet à la main, elle en ressortit plusieurs dizaines de minutes plus tard. Aalia avait longuement hésité puis elle s'était vue avec cette arme, cette nouvelle extension d'elle. Avec elle, elle avait de nouveau le sentiment d'être entière.
Ils allaient payer et payer très cher...

Retrouver le premier n'avait pas été difficile. Elle était garée à cent mêtres de chez lui, dans un petite peugeot de l'époque. Aalia l'attendait depuis plusieurs heures maintenant. Elle l'avait vu entrer mais ne savait plus que faire.

Si elle ne s'était pas souvenu de ce qui s'était passé ou si elle l'avait rencontré en d'autres circonstances, elle l'aurait trouvé séduisant. Grand, svelte, brun, un visage encore enfantin, jamais elle ne se serrait doutée de ce qu'il lui a avait fait.

Mais elle ne voyait rien de tout cela. Elle voyait juste le monstre qu'il était. L'animal qui l'avait violé ! Elle rageait intérieurement mais avait peur aussi...

Cela faisait trois jours qu'elle venait l'espionner ainsi... Elle avait compris qu'il irait au carnaval du lendemain costumé comme la plupart des gens. Elle y serait aussi, elle l'avait décidé...

Elle s'était déguisée en robe de bal du temps de Louis XIV avec un masque de tête de chat noir. Les yeux émeraude du chat étaient magnifiques. Aalia savait qu'il passerait dans certaines rues, elle l'y attendit dans l'ombre telle un chasseur à l'affut.
Il arriva enfin, postiché en squelette. Elle le suivit sur les routes de plus en plus bondées.
Elle était à dix mètres... Cinq... Quatre mètres... Trois... Deux... Elle se retrouva dans son dos, la foule était dense et en liesse. Mais elle n'avait qu'une idée en tête...
La lame frappa, une fois, deux fois... Les coups de surin se multiplièrent dans les reins de l'homme qui cria. Son cri était caché par le bruit de la foule et par la musique qui emplissait les rues de la ville.
Le corps chut. Quelqu'un le remarqua au sol. De la femme au masque de chat, il ne resta aucune trace.

Plus tard, cette nuit-là, Aalia embrassa la lame vengeresse couverte de sang.

Elle voulait trouver le deuxième. Son esprit ne pensait qu'à cela. Elle voulait le saigner, l'humilier, le torturer... et l'achever. C'était devenu une obsession. Elle en éprouvait le besoin.
Aalia alla jusqu'à demander aux enquêteurs de son affaire s'ils avaient trouvé quelque chose.L'enquête piétinait toujours et le meurtre n'avait rien fait pour arranger les choses. L'un des enquêteurs avait été démis de l'affaire pour aider sur celle du cadavre...

Aalia poussa le vice jusqu'à aller à l'enterrement de l'homme qu'elle avait tué. L'enquêteur la repéra mais n'alla pas la voir. Peut-être le connaissait-elle ? Il ne s'en inquiéta pas.
Aalia avait elle fait un grand pas. Le deuxième, celui qui lui avait échappé jusqu'alors, était là. Il pleurait son ami mort.

Bientôt, il ne pleurerait plus...

Elle l'avait traqué une semaine durant, se familiarisant avec lui. Pour lui, elle voulait faire les choses le mieux possible. Non... Le plus cruellement possible, c'était les mots justes.

Elle avait loué un garage sur le vieux port, aménagé de manière à ce qu'aucun bruit ne s'en échappe. Elle s'était trouvé aussi une décoction de pavot somnifère.

Un soir, alors qu'il oeuvrait dans sa ferme, la voiture de la jeune femme se percuta la barrière de l'entrée. L'homme sortit de sa grange et alla voir la voiture. Il fut ébloui par les phares. Quand il arriva au niveau de la fenêtre, il ne vit personne à l'intérieur... Il regarda autour de lui puis passa son corps par la fenêtre pour couper le contact et les feux.
Quand il se redressa, il sentit une piqûre au niveau de sa nuque. Puis un grand noir...

Un bruit de scie électrique le réveilla. Il était attaché sur un fauteuil en bois, un masque à boule sur le visage.
Quand il vit la jeune femme avancer vers lui avec la scie circulaire, il força de toutes ses forces sur ses liens. Mais rien n'y fit...

Plusieurs semaines plus tard...
Elle était dans le box. L'avocat avait fait son possible pour la défendre mais le ministère public l'avait traitée de psychopathe et demandait une peine de prison à vie. Les jurés n'étaient pas tous de son côté, elle avait tout de même découpé en morceau son deuxième agresseur et l'inspecteur qui s'occupait de l'affaire n'avait eu son salut qu'à sa coéquipière...
Les jurés revinrent donner leur verdict. Les femmes avaient fait leur possible pour atténuer la sentence bien plus compréhensives à son trouble intérieur. Néanmoins, les autres étaient pour un enfermement en institut psychiatrique suivi d'une peine de vingt années minimum...
Le juge, en entendant cela, choisit de réfléchir à la sentence. Prétextant un coût trop important pour la communauté d'un tel jugement, il obligea Aalia à s'engager à la FIRME et à partir sur Mars...

Là commença alors son histoire...